• INDELEBILESLuz fait le rêve de la normalité, dans lequel, ouvrant la porte de la salle de rédaction de "Charlie Hebdo" il retrouve tous les amis perdus dans l'attentat du 7 janvier 2015 et tous les autres collaborateurs. Il évoque ainsi le souvenir de l'ambiance à la fois sérieuse et potache qui régnait au sein de l'équipe, le stress des bouclages, le choix collégiales des unes, les personnalités singulières de Charb, Tignous, Gébé, Catherine Meurisse, Luce Lapin, Wolinski, et bien d'autres mais par dessus tous Cabu à qui il doit ses premiers pas de dessinateur de presse grâce à sa rencontre presque fortuite dans les rues de Paris. Toutes ces réminiscences, loin de plonger dans la commisération, donnent en partage la belle humeur, la jovialité, la bonne entente de cet essaim d'intelligences satiriques qui travaillaient ensemble. Les éclats de rire viennent au lecteur à la découverte de ces anecdotes pleines de vie, donnant le sentiment de côtoyer si ce n'est ces êtres en tout cas leurs esprits toujours vifs et incisifs. Bel et émouvant hommage qui n'a rien d'une oraison funèbre !

    Auteur : Luz


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  • LA NOTE AMERICAINEEn Amérique, le génocide des peuples indiens par l'homme blanc a laissé quelques survivants, ils sont parqués dans des réserves, déplacés au gré du bon vouloir des administrations. Au début du XXème siècle, le peuple osage est confiné sur des territoires rocheux en Oklahoma, mais le sous-sol se révèle au final gorgé de pétrole, les Osages sont millionnaires et cette richesse attisent les appétits. Plusieurs indiens meurent, assassinés, à l'arme à feu ou empoisonnés; les enquêtes - quand elles sont diligentées ! - avortent faute de moyens mis en œuvre et de compétences. Les disparitions se poursuivent et le Bureau of Investigation, futur FBI, prend la relève et il fait bien car il va mettre à jour la corruption de tous les rouages de la société pour s'accaparer la fortune des Osages considérés non comme des citoyens à part entière mais comme les rebuts dont il s'agit plus ou moins discrètement de se débarrasser. C'est le Règne de la terreur pour les Indiens. Un homme est au centre de cette organisation criminelle mais tout le monde ou presque semble s'en accommoder ou en tirer profit. Ce récit met en lumière un pan d'histoire des Etats-Unis plutôt méconnu et pour cause, il n'y a pas d'ignominie dans lequel l'homme est prêt à tomber pour s'octroyer les biens d'autrui, pour asservir l'autre par la stigmatisation et par la violence individuelle conjuguée à une violence institutionnalisée. Roman noir, très noir.

    Auteur : David Grann


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  • LE NOUVEAU NOM (L'AMIE PRODIGIEUSE T2)Le roman s'ouvre sur le mariage de Lila, l'amie prodigieuse de Lena, la narratrice. Lila a tout juste seize ans et épouse Stefano, un homme de son quartier, auprès de qui le confort et l'aisance financière lui sont assurés, il lui semble en être amoureuse mais le dégoût va très vite l'étreindre, son indocilité lui vaut d'éprouver la violence conjugale et le viol, mais son fort caractère associé à sa vive intelligence ainsi qu'à sa fougue la poussent à s'extraire de la vie étriquée à laquelle elle paraît condamnée à l'instar de bien des générations de femmes italiennes. Lena suit un autre chemin, elle poursuit ses études, se fait remarquer par ses professeurs pour son sérieux et son acuité intellectuelle, gagne l'estime de tous mais un gouffre persiste toujours, malgré les apparences, entre les étudiants issus de milieux plus favorisés et elle comme si l'éducation et l'acquisition d'une certaine culture n’effaçaient en rien les différences sociales, comme si ces élèves étaient investis - par le seul fait d'avoir vécu dès la naissance dans un confort bourgeois ! - d'une assurance, d'une confiance qu'elle ne parviendra jamais à gagner, quelque effort qu'elle puisse faire. Elena Ferrante peint une fresque qui mêle le social aux destins singuliers, donnant à la banalité un relief intriguant, conférant à ces personnages une dimension romanesque, le tout avec un style gouleyant, coulant comme un lait crémeux dans le gosier d'un lecteur/une lectrice famélique.

    Auteur : Elena Ferrante


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  • CHARLOTTE IMPERATRICE T1 - LA PRINCESSE ET L'ARCHIDUCCharlotte de Belgique a la chance d'avoir un père aimant qui préfère la laisser choisir son futur époux parmi les prétendants déclarés plutôt que de lui en imposer un par intérêt. Les inclinations du cœur ne donnent cependant pas forcément un couple heureux. Son mariage avec l'archiduc Maximilien d'Autriche aussi prometteur qu'il puisse paraître va être quelque peu plombé, les années passant, par le poids des responsabilités et des obligations liées au statut auquel appartient la famille de Maximilien. Il se trouve en effet être le frère cadet de l'empereur François Joseph et le jouet politique de ce dernier dans sa rivalité avec Napoléon III. Sa femme Charlotte subit un mari velléitaire et cacochyme ainsi qu'une situation désespérante mais, aidée par sa famille, elle prend son destin en main et profite de certains événements qui les emmènent, elle et son époux, au Mexique. Fabien Nury écrit avec un talent d'orfèvre un scénario, des textes et des dialogues ciselés, il s'inspire de la biographie d'un personnage historique et parvient à rendre vivante, incarnée, pétillante une figure qui aurait pu rester académique. Matthieu Bonhomme, digne héritier de Morris, donne des planches de toute beauté dans lesquelles le visage de Charlotte est au centre, passant par tous les états et les émois. L'album dresse le portrait captivant d'une femme qui, face à l'adversité, choisit le combat.

    Auteurs : Fabien Nury et Matthieu Bonhomme


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  • LES RICHES AU TRIBUNAL - L'AFFAIRE CAHUZAC ET L'EVASION FISCALELe procès de Jérôme Cahuzac est l'occasion pour les sociologues Monique et Michel Pinçon-Charlot de décrire dans le détail l'affaire à laquelle le nom du ministre de l'économie et des finances de François Hollande est lié. On y apprend que l'évasion fiscale élaborée pour son propre intérêt par celui-là même qui avait à charge de traquer les fraudeurs serait sans doute resté secret si un différent entre les époux Cahuzac n'avait pas tout étalé sur la place publique et si un enregistrement fortuit, d'un Jérôme Cahuzac imprudent, n'était pas après de longs détours et de longues années tombé entre les mains d'un journaliste de Médiapart. Les sociologues s'appliquent à décortiquer la mécanique des événements, montrant comment dans les hautes sphères la rétention de l'information est un procédé pour protéger l'un de ses membres, comment s'organise - pour peu qu'on appartienne à la caste des nantis et des hommes d'influence ! - tout un système de défense afin de minimiser une condamnation à l'égard d'un homme non pas mouton noir mais symbole de ce qui devrait rester caché aux yeux du vulgum pecus. Les jeux de connivences entre hommes politiques de tout bord, les accointances entre eux et une certaine presse sont mis en lumière. Sans le travail de la presse indépendante et sans la pression de l'opinion publique, Jérôme Cahuzac n'aurait peut-être pas eu à répondre devant les tribunaux de ses turpitudes et malversations financières. Etienne Lécroart qui se met en scène dans le rôle du candide réussit par ses dessins, où l'humour est au service du sérieux, à clarifier les systèmes volontairement complexes et opaques, la caricature permet une lecture ludique, fluide et effarante. "Les riches au tribunal" est l'album de référence sur une affaire qui a décrié la chronique et qui donne la mesure, face émergée de l'iceberg qu'elle est, du système d'évasion fiscale organisé quasi mafieux d'une certaine caste de la société française. Un album d'indignation salubre !

    Auteurs : Monique Pinçon-Charlot, Michel Pinçon-Charlot et Etienne Lécroart


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