Deux frères, l'un, Abdallah, officier dans l'armée syrienne, l'autre, Karim, étudiant en médecine, sont épris de la même femme, Fatima. Elle a refusé le mariage proposé par Abdallah et Karim n'a pas eu le temps de lui demander sa main qu'il apprend ses noces avec un dignitaire du parti de Bachar El Assad, le dirigeant du pays qui règne, après son père, en dictateur, surveillant de près la population avec ses différentes milices armées. Le peuple syrien aspire cependant à la liberté, guidé qu'il est par l'exemple tunisien puis égyptien, les manifestations pacifistes commencent, elles sont vivement réprimées mais les insurgés ne baissent pas les bras et s'organisent. La violence du camp gouvernemental est de plus en plus manifeste, les activistes sont torturés et leurs corps ou leurs têtes sont exposés pour terroriser la population. Karim se fait reporter et filme toutes les exactions des pro-Bachar El Asssad, recueille les témoignages à charge afin d'attirer l'attention des autorités internationales, l'ONU au premier chef. Son frère, Abdallah, fervent défenseur de la ligne dure du gouvernement, va basculer du côté de la révolution. Les armes parlent mais Bachar El Assad a la maîtrise totale de l'espace aérien et profite de cette supériorité pour bombarder les quartiers sous la houlette des insurgés. Les révolutionnaires s'allient avec les islamistes pour contrer les forces dites légales de Syrie... Le récit montre toute la complexité du conflit syrien et parvient à le rendre compréhensible aux néophytes, le tour de force est d'autant plus réussi qu'il est fait sans pédagogie ostentatoire avec pour fil conducteur une histoire d'amour poignante à la Roméo et Juliette. Jean-Pierre Filiu pointe du doigt les tergiversations des observateurs de l'ONU engoncés dans leur mandat, le non interventionnisme des Etats-Unis avec leur "ligne rouge" à géométrie variable, représentée par l'utilisation des armes chimiques. Le récit ne se complait pas à rester à distance, il fait entrer le lecteur au coeur du conflit.

Auteur : Jean-Pierre Filiu et Cyrille Pomès